Origines de Mai 68


Introduction   

 

            Nous fêtons cette année les cinquante ans des événements de mai 68, mouvement conjoint d’étudiants et d’ouvriers se constituant de manifestations, de grèves et de revendications prenant place sur plusieurs mois. Nous nous intéressons ici aux origines du mouvement. Cela comprend des dates et des événements précis, mais également des non-dits, des conditions de vie rejetées, soit les raisons sous-jacentes pouvant expliquer l’ampleur du mouvement.

Cet article a été réfléchi grâce à quelques documents existant sur mai 68 mais surtout à partir des témoignages recueillis lors de l’enquête effectuée en 2017/2018 par des étudiantes en anthropologie sur cette période mouvementée.

 

Liberté sexuelle

 

            Le 8 janvier 1968,  François Missoffe, ministre des sports, vient inaugurer la piscine du campus de Nanterre, à Paris. Une cinquantaine d’étudiants en profitent pour amener le sujet de la mixité. En effet, dans les causes sous-jacentes du mouvement de mai 68 se retrouvent les conditions de vie au sujet de la sexualité. Madame H, une femme de vingt-deux ans lors des événements, qui était infirmière à l’hôpital Edouart Herriot à Villeurbanne et séjournait dans une résidence pour infirmières, reporte qu’elle n’avait pas le droit de faire monter des hommes dans sa chambre. Cette interdiction s’étendait même à sa famille, l’infirmière ayant été réprimandée par le concierge après avoir fait entrer son père.

 

Ca paraît ahurissant. On travaillait, gagnait notre vie, je n’avais plus de comptes à rendre à mes parents. J’étais indépendante, mais nous n’avions pas le droit.” (Madame H, 2018)

            Ce n’était pas la seule interdiction. Les femmes n’avaient pas le droit d’aller en stage en pantalon, elles devaient porter des couleurs neutres, et les formatrices vérifiaient même qu’elles portaient bien des bas. Lors de mai 68, les conditions de vie de la population ont été critiquées et mises en avant, les valeurs de la société s’étant transformées au cours du temps sans que ses lois et normes ne suivent immédiatement.

 

            Ainsi, le 21 mars 1967, des étudiants décident de manière spontanée d’investir le bâtiment de la cité U réservé aux étudiantes, à Paris. Les protestataires défendent la mixité des résidences universitaires, et se font déloger par les forces de l’ordre.

 

Entreprises et syndicats

 

         Rapprochement CGT/CFDT

 

            L’origine des événements de mai 68 ne daterait pas de l’année même. Pour monsieur D, un syndicaliste de la CGT, ancien gazier à EDF dans la localité de Villeurbanne, le mouvement prendrait sa source en 1966. En effet cette année-là a prit place un accord entre les syndicats CGT et CFDT à Paris, avec un cahier revendicatif national demandant l’augmentation des salaires, l’augmentation du smic, les libertés syndicales et la protection sociale. En effet, il était alors interdit au sein des entreprises de se réunir au niveau syndical.

            Ainsi, en 1967 sont apparues les ordonnances sécurité sociale. La sécurité sociale a été séparée en trois entités, la CNAV (la vieillesse), la CAF (familiale) et la CAN (maladie). On assiste alors à une unité d’action de la CGT et de la CFDT, qui ont appelé aux manifestations contre les ordonnances. Ce rapprochement entre les deux syndicats, initié en 1966, donne de la légitimité et de l’ampleur au mouvement qui allait suivre.

 

         Trente Glorieuses et conditions de travail

 

            Ces années étaient conjointes aux Trente Glorieuses (1945-1973). Pour monsieur D, le patronat et les grosses entreprises en profitaient, ce qui n’était pas le cas des employés, générant ainsi un mécontentement général. En 67 ont eu lieu 4 000 000 à 4 500 000 journées de grève, un chiffre record depuis le début de la 5ème République, avec des appels à la grève de la part de la CGT, la CFDT, la FEN et le FO. A Lyon ces grèves ont eu lieu à EDF, à la Rodhiaceta, l’usine de textiles artificiels, chez Berlier, le conflit s’étendant au site de Lyon Vaise. Les salariés partaient en grève pour des augmentations de salaire, mais plus encore pour les conditions des ouvriers affectés au travail posté en quatre-huit (horaires  alternant entre équipes du matin, de l’après-midi et de nuit tous les deux ou trois jours).

 

          Guerre dAlgérie

 

            A cause de la guerre d’Algérie, plusieurs manifestations d’opposition organisées à l’appel de la CGT ont été interdites, provoquant diverses violences dont ont résulté morts et blessés. Il est en effet dangereux d’interdire ainsi un rassemblement, étant donné les difficultés à prédire les déplacements des manifestants.

            En 1968, De Gaulle a autorisé la manifestation du premier mai, ce qui peut expliquer son ampleur. Elle est décrite par monsieur D comme une “manifestation monstre” (Monsieur D, 2018).

 

 

Conclusion

 

            Les événements de mai 68 seraient dus à de nombreux points sous-jacents. En plus des revendications des ouvriers et des étudiants, ils seraient la manifestation d’une révolte contre la génération précédente et d’une société dont les lois évoluaient moins vite que les mentalités.

L’engagement des étudiants comme des ouvriers viendrait de leurs conditions de vie et de travail, dont la critique prit de l’ampleur au cours du temps et par la généralisation du mécontentement, auquel le nombre et les syndicats alliés a donné voix et légitimité.


Bibliographie

 

Anonyme, “Les prémices”, La CGT, consulté en ligne le 24 mars 2018.

URL: http://www.cgt.fr/internet/images/68/Mai68_Les_premices.html

 

Monsieur D, entretien du 23 février 2018.

 

Madame H, entretien du 27 mars 2018.

 

Vigna X, “1966 et 1967 Vers la grève générale de 1968”, Midi Insoumis, Populaire et Citoyen,  15 février 2018, consulté en ligne le 06 mai 2018. URL: http://www.gauchemip.org/spip.php?article8505